Haine en ligne : comment faire ?

Dans un contexte de procès en cyberharcèlement, le 30e rapport annuel de la CNCDH sur la lutte contre le racisme, l’antisémitisme et la xénophobie(nouvelle fenêtre) porte une attention particulière aux messages haineux sur les réseaux sociaux. La Commission formule à cet égard des recommandations, approfondies dans un avis sur la lutte contre la haine en ligne, publié également le 8 juillet indépendamment du rapport.

Plus généralement, la société française se montre plus tolérante à l’égard des minorités par rapport à l’année précédente, malgré un contexte difficile de pandémie et de terrorisme. La Commission pointe cependant une présence toujours forte de préjugés racistes, notamment envers les Roms, les personnes musulmanes ou encore d’origine asiatique, les Roms étant la minorité la moins tolérée (l’indice de tolérance à leur égard n’étant que de 36%).

 

Sommaire

Haine et cyberharcèlement

Le racisme et l’antisémitisme sont très présents dans les discours haineux véhiculés sur internet, s’inquiète la CNCDH. Elle souligne les graves conséquences sur la vie des personnes touchées. D’autant plus quand ce mécanisme devient viral et engendre « plusieurs centaines de messages par jour ».

La Commission appelle à créer une instance indépendante de régulation d’internet en France pour prévenir la publication de propos haineux et imposer des obligations aux réseaux sociaux et plateformes. L’avis sur la haine en ligne recommande que cet organisme soit placé sous l’égide de l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom) dont la mise en place est prévue par le projet de loi sur la communication audiovisuelle.

 

Rappelant son « attachement au respect d’un équilibre entre la liberté d’expression et l’objectif légitime de la lutte contre la haine en ligne », la CNCDH préconise de :

  • renforcer le rôle de l’État en donnant plus de moyens à la future Arcom et à la justice pour accompagner les victimes et simplifier les procédures ;
  • créer de nouvelles obligations à l’égard des plateformes en ligne et réseaux sociaux et prévoir des sanctions en l’absence de modérateur de contenus ;
  • accompagner et responsabiliser les utilisateurs, dès leur plus jeune âge (plan d’action national pour l’éducation et la citoyenneté numériques).

 

Incitation à la haine : Réaction

Avant de répondre à cette question, permettez-moi de vous rappeler ce qu’est le discours de haine. Le droit international ne définit pas le discours de haine. Néanmoins, l’ONU définit le discours de haine comme toute forme de communication, qu’il s’agisse d’expressions ou de conduites orales ou écrites, qui constitue une infraction ou utilise un langage péjoratif ou discriminatoire à l’encontre de toute personne ou groupe en raison de son identité, en d’autres termes, sa croyance religieuse, son origine ethnique, nationalité, race, couleur, origine nationale, sexe ou d’autres facteurs qui déterminent l’identité. Alors, comment réagir face à elle ?

 

  1. Signaler le message

Beaucoup de gens ne le savent peut-être pas. Lorsque vous créez un compte sur Facebook, Twitter ou un autre réseau social, il existe des conditions générales d’utilisation que vous acceptez en créant un profil. Les règles de divers réseaux sociaux condamnent les messages destinés aux personnes en raison de leur race, religion ou origine ethnique. Mais Facebook et Twitter, par exemple, ne suppriment certains messages haineux qu’après avoir reçu une notification d’un utilisateur. Il est donc important de signaler tous les messages haineux que l’on trouve sur internet. En se référant à votre signalement, le réseau social concerné peut décider de mettre ces publications hors ligne, voire de bloquer temporairement ou définitivement le compte de l’auteur.

 

  1. Demandez au modérateur de le supprimer

Si le message haineux se trouve sur un site ou une page Facebook, demandez à l’administrateur de le supprimer. Par exemple, au Cmpj régional, nous avons des modérateurs sur toutes nos plateformes sociales et sur notre site internet. Si jamais vous découvrez une publication haineuse, n’hésitez pas à envoyer un message privé au modérateur. Et il en tiendra compte.

 

  1. Répondre au message de haine

Même si vous n’êtes pas personnellement victime ou cible d’un discours de haine, vous pouvez faire quelque chose. Par exemple, vous pouvez laisser un commentaire pour nous faire savoir que vous n’êtes pas d’accord avec cette publication. Ne blâmez pas l’auteur, mais contestez le discours de haine, si possible avec des preuves à l’appui. Cependant, si vous hésitez à répondre directement à un message haineux sur Internet, une autre façon subtile de répondre est d’écrire vous-même des messages positifs sur le même sujet et de les publier sur votre compte.

Cinq propositions pour durcir la réglementation européenne

Concrètement, comment faire ? En modifiant la réglementation européenne (puisqu’en ces matières, c’est elle qui seule s’impose) pour créer une véritable responsabilité des plateformes sous le contrôle du juge. La Commission a proposé un bon texte qu’il faut encore « durcir » dans cinq directions.

  1. Les plateformes doivent avoir l’obligation de censurer les contenus illicites dans un délai bref sous peine de sanction significative.
  2. Elles doivent avoir une obligation de surveillance des contributeurs à très forte audience ou récidivistes : les comptes qui disposent de millions d’abonnés ou ceux qui ont déjà été condamnés par exemple pour incitation à la haine raciale.
  3. Les procédures de saisie du juge pour contester une décision (ou une absence de décision) de censure des plateformes doivent être elles-mêmes enfermées dans des délais courts.
  4. Un certain nombre d’acteurs essentiels de la démocratie – les médias, les partis politiques, les syndicats – doivent être à l’abri de ces procédures de surveillance et de sanctions pour éviter toute interférence avec le débat démocratique.
  5. Enfin, si l’anonymat des contributeurs doit être préservé vis-à-vis du public, il doit être levé vis-à-vis des plateformes. On ne peut pas ouvrir un compte sans s’identifier afin que la justice puisse vous poursuivre le cas échéant. À la liberté doit correspondre la responsabilité. C’est la seule dissuasion efficace au service de la loi.

 

Les plateformes ont ouvert une voie royale à la liberté d’expression en permettant à chacun de parler à tous. Il faut maintenant civiliser ce mouvement. Et si la France qui présidera l’Union européenne dans quelques mois en prenait l’initiative ?

 

 

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